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Point de vue

Les terrasses éphémères, un concept compris mais mal organisé

Anne Hidalgo et ses mairies d’arrondissement ont proposé aux restaurants de s’étendre dans les rues. L’objectif était de rattraper les pertes économiques liés aux fermetures.  Ceux-ci ont ouvert des terrasses éphémères, dont certaines seraient aujourd’hui « pourries » selon Baptiste*, riverain du 17e. Derrière cette proposition, une stratégie urbaniste pourrait arriver…

Fin janvier, Baptiste a lancé un compte Instagram : « @balancetaterrasse ». Visiblement choqué par une initiative économique de la mairie centrale, il dénonce en photo les terrasses éphémères. La plupart viennent de son arrondissement, le 17e.

Ces terrasses ont, en quelques mois et notamment pendant la saison hivernale subi la pluie, et pourries. Dans cet état, la ville de Paris pourrait repousser certains touristes.

Faites de palettes en bois, ces terrasses « devront être rafistolées par les restaurateurs à leur réouverture », un investissement faible mais toujours supplémentaire pour les bars et bistrots parisiens. Grâce à ce premier investissement, les restaurateurs du 9e arrondissement qui dépassaient peut-être le cadre légal, ou Guillaume, barman du 17e ont été aidé économiquement. Celui-ci l’assure fermement.

Par Instagram, la mairie de 17e arrondissement, mentionnée, a très vite contacté Baptiste. Le maire Geoffroy Boulard et ses conseillers sont responsables des problèmes du quartier. Ils soutiennent l’initiative du jeune homme et sont à l’écoute. Ils ont donc promis à leur riverain de relancer le « comité terrasse ». Cependant, la mairie de l’arrondissement ne peut rien faire sauf « remonter les problèmes et solutions proposés par leurs habitants à la mairie centrale » peste Baptiste.

Baptiste est exaspéré face au manque de réaction de la mairie de Paris : « elle est bien plus responsable que les restaurateurs, dont beaucoup n’habitent pas près du commerce où ils travaillent » indique le Parisien. Le jeune homme est énervé par le « manque de stratégie à moyen et long terme » de la mairie de Paris.

L’habitant du 17e remarque que les terrasses sont « pourries à l’image de la situation que vit la restauration française ». Sur la chaussée, le bois et le contreplaqué formant les terrasses éphémères se déversent dans les eaux de Paris…

Les restaurateurs pas blâmés

Si la dénonciation exercée sur @balancetaterrasse est presque quotidienne, Baptiste salue aussi les toitures en plexiglas qui protègent le bois de rares terrasses.

Elles ne sont pas seules puisqu’un restaurant de street-food gastronomique cuisine dans la street ! Dans le 3earrondissement, les habituelles places des clients sont chauffées par les cuisines pour servir à emporter ceux qui passent dans la rue.

Pour le Parisien, la plupart des terrasses éphémères sont mal construites parce que le restaurateur a fait « avec les moyens du bord ». Il précise « qu’ils ont dû aller vite après avoir reçu peu d’argent (NDLR : avec le confinement) et donc n’ont pas voulu beaucoup investir » en juin dernier.

En revanche, fermés, les restaurateurs laissent pourrir choses « parce qu’ils n’habitent pas où ils travaillent » selon le riverain qui comprend que cela peut être une forme de protestation… N’ayant pas de nouvelles du gouvernement, ceux-ci ne souhaitent pas démonter leurs terrasses. Derrière, les automobilistes iraient reprendre leurs droits et les deux entités devront se battre pour récupérer ou garder l’espace.

Une stratégie de la mairie centrale…

 « Anne Hidalgo est très maline » selon Baptiste qui analyse la situation. Réelue avec l’étiquette sociale-écologiste, Anne Hidalgo et ses projets ne sont pas si verts que cela pour lui.

Ouvrir des terrasses l’hiver n’est pas la meilleure solution écologique également. Les restaurants et bars chaufferaient leurs places afin d’attirer. Une nécessité suite à leurs pertes économiques… Cependant, les confinements et couvre-feux n’auront permis leur utilisation ! Les rares terrasses utilisées durant n’étaient pas isolées. Et logiquement, les restaurateurs en ont profité pour déployer leurs chauffages afin d’accueillir un maximum de clients.

Si David Belliard (EELV) expliquait vouloir supprimer « près de la moitié des 140 000 places de stationnements d’ici 2026 » quelques mois plus tôt à BFMTV. Selon le riverain du 17e arrondissement, Anne Hidalgo souhaite faire « passer doucement la pillule ». La charte lancée par la mairie de Paris en mai permettait aux restaurateurs d’agrandir leurs établissements sans emprunter l’espace de riverains ou d’autres commerçants.

Et même si ces terrasses éphémères devaient durer jusqu’en juin prochain, Guillaume, barman dans le 17e arrondissement, répond à l’instagrammeur : « La terrasse n’a pas été partiellement démontée par des riverains excédés. Ce sont les restes de ma terrasse qui a été démontée par la mairie. »

En effet, Guillaume a été surpris en voyant que des arceaux métalliques fixes pour les vélos avaient été remplacé ce vendredi 5 février. Pour cela, la mairie, « sans me prévenir », a détruit sa terrasse éphémère, la laissant près d’un parking à trottinettes raconte-t-il !

Au final, le barman déplore l’argent et le temps perdu : « j’ai passé une journée à créer cette terrasse éphémère et aujourd’hui je ne profite plus de la place que j’avais… »

Quelques semaines plus tôt, Baptiste expliquait la ruse d’Anne Hidalgo était rusée : quand ils retireront les terrasses en voyant les Parisiens excédés, le jeune homme imagine « la mairie mettre du vrai béton et des vraies terrasses ou des pistes cyclables pour remplacer les places stationnement définitivement supprimées ! » En écoutant Guillaume, certains peuvent croire que ce qu’imaginait Baptiste a déjà commencé…
 

Devant son bar, les agents municipaux ont fait croire à Baptiste qu’un restaurateur ne respectait pas la charte qu’il avait signé.
Devant son bar, les agents municipaux ont fait croire à Baptiste qu’un restaurateur ne respectait pas la charte qu’il avait signé. Crédit Photo : Baptiste

Sans place de stationnement, « les VTC et taxis devraient donc se masser et marauder dans la capitale » selon Baptiste. Ceux-ci viendraient aussi d’entrepôts situés dans la banlieue parisienne. Pour le Parisien, les touristes viendraient seulement l’été pour profiter des terrasses, « sauf si les gens prennent les transports en commun ». Un autre problème s’ajoute : tous les Franciliens ne disposent pas de transports en commun à proximité. Et encore, ceux-ci doivent être ouvert, notamment tard le soir, pour laisser le temps de profiter des bars ! » explique Baptiste.

Durant le reste de l’année, les Parisiens aimeraient profiter de leurs places de stationnement puisqu’aujourd’hui, dans le 17e arrondissement, « on ne peut pas se garer ! » assure Baptiste. 

… Auquel il propose une solution

Baptiste estime que les terrasses éphémères n’ont servi à rien cet hiver. Le confinement y est pour beaucoup. Cependant, il explique que ce concept de terrasses « typiquement parisien » est apprécié par les résidents de la capitale. Ceux-ci, en temps normal, profitent de cet extérieur, alors que les loyers coûtent entre 1200 et plus de 1650 euros pour un 40 m2. Tous n’ont donc pas cette surface et retrouvent leurs amis devant les bars en bas de chez eux.

À l’instar des maraîchers, Baptiste propose que les terrasses soient installées par la mairie puis rangées selon les saisons : comme les marchés, les restaurateurs pourraient mettre des tentes, les déplier et les désinstaller avant que la mairie vienne nettoyer derrière.

À la base, Baptiste pense que la terrasse, éphémère ou non, reste un concept intéressant. Cependant, il espère que ce système sera encadré et réfléchi.

* par souci d’anonymat, le prénom a été changé

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